NOTE III. TERRES DISTRIBUÉES AUX LEUDES FRANCS APRÈS LA CONQUÊTE.

Saint-Simon dit que les terres distribuées aux leudes ou compagnons des rois après la conquête s'appelèrent fiefs. L'assertion n'est pas entièrement exacte. Ces terres portèrent primitivement le nom de bénéfices (beneficia), ou terres accordées en récompense des services. Dans l'origine, elles ne donnaient pas à ceux qui les obtenaient les droits de souveraineté, c'est-à-dire le droit de battre monnaie, de lever des impôts, de rendre la justice et de faire la guerre. Les rois pouvaient même enlever ces terres aux leudes qui ne remplissaient pas avec exactitude les obligations qui leur étaient imposées. Ce fut seulement par le traité d'Andelot (587) et surtout par les usurpations si fréquentes dans ces temps d'anarchie que les leudes rendirent les bénéfices inamovibles et héréditaires. Quant aux fiefs et au régime féodal, il faut arriver au IXe siècle pour en trouver l'organisation solidement établie et conférant les droits régaliens qui ont été énumérés plus haut. La plupart des historiens antérieurs à notre siècle ont confondu les bénéfices et les fiefs, comme le fait Saint-Simon dans ce passage. On doit surtout à M. Guizot d'avoir relevé cette erreur dans ses Essais sur l'histoire de France et dans son Cours de l'histoire de la civilisation en France, il a nettement marqué la distinction entre les bénéfices et les fiefs, tout en montrant que la distribution des bénéfices et les usurpations des leudes ont conduit peu à peu au régime féodal.

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