CHAPITRE XIV.

1694

Directeurs et inspecteurs en titre. — Horrible trahison qui conserve Barcelone à l'Espagne pour perdre M. de Noailles. — Établissement de la capitation. — Comte de Toulouse reçu au parlement et installé à la table de marbre par Harlay, premier président. — Procès de M. le prince de Conti contre Mme de Nemours pour les biens de Longueville. — Un bâtard obscur du dernier comte de Soissons, prince du sang, comblé de biens par Mme de Nemours. — Il prend le nom de prince de Neuchâtel, et épouse la fille de M. de Luxembourg.

Lors même de ce retour des armées, le roi créa huit directeurs généraux de ses troupes et deux inspecteurs sous chaque directeur. M. de Louvois, pour en être plus maître et anéantir l'autorité des colonels, avait imaginé d'envoyer des officiers de son choix, sous le nom de celui du roi, voir les troupes par frontière et par district, et de leur donner tout crédit et toute confiance. Le roi, content que c'était la meilleure chose du monde pour son service, et encore piqué de n'avoir jamais pu tirer la charge de colonel général de la cavalerie des mains du comte d'Auvergne pour M. du Maine, voulut ajouter à ce que M. de Louvois avait inventé, et s'en servir à des récompenses. Il donna douze mille livres d'appointements aux directeurs et une autorité fort étendue sur tout le détail des troupes de leur dépendance. Chacun d'eux devait faire deux revues par an, en sortant de campagne et à la fin de l'hiver, et entre ces deux revues les inspecteurs devaient en faire plusieurs. Ils eurent six mille livres, devaient rendre compte de tout à leur directeur, et celui-ci au secrétaire d'État de la guerre, et quelquefois au roi, chaque département de directeur séparé en deux pour les deux inspecteurs, desquels tous la moitié était fixée à l'infanterie et l'autre moitié à la cavalerie; outre un pouvoir étendu en toute espèce de détails de troupes; les directeurs les pouvaient voir en campagne, mettre aux arrêts, interdire même les brigadiers de cavalerie et d'infanterie; et les inspecteurs, qui furent tous pris d'entre les brigadiers, eurent un logement au quartier général, et dispense de leur service de brigadiers pendant la campagne. Telle fut la fondation de ces emplois qui blessa extrêmement les officiers généraux de la cavalerie et des dragons.

Le comte d'Auvergne, nourri de couleuvres sur sa charge depuis longtemps, avala encore celle-ci en silence. Rosen, étranger et soldat de fortune jusqu'à avoir tiré un billet pour maraude, quoique de bonne noblesse de Poméranie, devenu lieutenant général et mestre de camp général de la cavalerie, était un matois rusé qui n'avait garde de se blesser, et qui loua au contraire cet établissement. Villars, lieutenant général et commissaire général de la cavalerie, ébloui de sa fortune et de celle de son père, se fit moquer des deux autres à qui il proposa de s'opposer à une nouveauté si préjudiciable à leurs charges, et encore plus du roi à qui il osa en parler. Huxelles pour l'infanterie et du Bourg pour la cavalerie eurent la direction du Rhin; ils se retrouveront ailleurs: le premier lieutenant général et chevalier de l'ordre, l'autre maréchal de camp. Chamarande et Vaudray, deux hommes distingués par leur valeur, par leur application et par leur mérite: Vaudray était d'une naissance fort distinguée, du comté de Bourgogne, singulièrement bien fait, mais cadet et pauvre. De chanoine de Besançon, il prit un mousquet, devint capitaine de grenadiers et reçut trente-deux blessures, dont plusieurs presque mortelles, à l'attaque de la contrescarpe de Coni sans vouloir quitter prise, et y fut laissé pour mort. Cette action le fit connaître, et lui valut peu après le régiment de la Sarre. Chamarande avait été premier valet de chambre du roi en survivance de son père qui l'avait achetée de Beringhen, et en avait conservé toutes les entrées. Le père était de ces sages que tout le monde révérait pour sa probité à toute épreuve et pour sa modestie. Il avait vendu sa charge, et le roi, qui l'aimait et le considérait fort au-dessus de son état, l'avait fait premier maître d'hôtel de Mme la Dauphine lors du mariage de Monseigneur. Il fit cette charge au gré de toute la cour et eut toujours la meilleure compagnie à sa table. Son fils eut encore sa survivance. Ayant perdu sa charge avec sa maîtresse, il demeura à la cour et y eut toujours chez lui la plus illustre compagnie, quoiqu'il n'eût plus de table, qu'il fût perclus de goutte, et qu'on ne vît jamais de vivres chez lui. Le roi envoyait quelquefois savoir de ses nouvelles, car il ne pouvait plus marcher, et lui faire des amitiés; et je me souviens qu'il était en telle estime que, lorsque mon père me présenta au roi et ensuite à ce qu'il y avait de plus principal à la cour, il me mena voir Chamarande. Son fils était fort joliment fait, discret, sage, respectueux, et fort au gré des dames du meilleur air. Il eut par degrés le régiment de la reine, et se distingua fort à la guerre. M. le Duc, M. le prince de Conti, M. de La Rocheguyon et de Liancourt, MM. de Luxembourg père et fils, et quantité d'autres des plus distingués l'aimaient fort, et vivaient avec lui en confiance et en société. Monseigneur le traitait fort bien et avec distinction, quoique la difficulté de manger avec lui l'empêchât d'être de ses parties et de ses voyages. Mais le rare avec cela est qu'ayant épousé Mlle d'Anglure, fille du comte de Bourlaymont, unique et riche, et femme d'un vrai mérite, sa naissance aidée de ce mérite et de l'amitié du roi pour le bonhomme Chamarande la fit entrer enfin dans les carrosses de Mme la Dauphine.

Romainville et Montgomery furent les deux inspecteurs pour la cavalerie. De Romainville, j'en ai déjà parlé, vieil officier extrêmement aimé et estimé, et qui méritait de l'être. Le nom de l'autre annonce sa haute naissance; mais sa pauvreté profonde l'avait réduit aux plus étranges extrémités en ses premières années, d'autant plus cruelles à supporter qu'il sentait le poids de son nom, et était pétri d'honneur et de vertus. Parvenu à grand'peine à une compagnie de cavalerie, il se distingua tellement en un petit combat contre le général Massiette qui était dehors avec un fort gros parti, que Massiette qui l'avait pris le renvoya sur sa parole comblé d'éloges. Le roi qui commandait son armée le loua extrêmement, lui donna une épée et un des plus beaux chevaux de ceux qu'il montait, et lui fit l'honneur de le faire manger avec lui, qu'aucun capitaine de cavalerie n'avait eu avant lui. Un mois après il vaqua un régiment de cavalerie qu'il eut avec grande distinction, et servit depuis avec application et soutint la réputation qu'il avait acquise. Il aurait été plus aimé si la capacité lui avait permis d'être moins inquiet, et si l'humeur n'avait pas été un nuage qu'on ne se soucie pas toujours de percer pour trouver la vertu qu'il cache. Les maréchaux de Duras et de Lorges, ses parents, le protégeaient fort, et encore plus M. de La Feuillade, tant qu'il vécut, attaché au char de Mme de Quintin, chez qui Montgomery logeait à Paris, tous deux enfants des deux frères. Il s'était de nouveau signalé à la bataille de Staffarde où il eut une main estropiée. Il ne laissa pas d'avoir la double douleur de voir du Bourg, son cadet, maréchal de camp et directeur, et lui d'être brigadier et inspecteur sous lui. On cria fort et de la préférence et de cette espèce d'affectation, et Montgomery, bien qu'outré, n'osa refuser, et se conduisit avec beaucoup de sagesse.

Besons qui n'était que brigadier de cavalerie, et Artagnan, major du régiment des gardes françaises, eurent les deux directions de Flandre. Je parlerai d'eux ailleurs. Coigny, beau-frère de MM. de Matignon, et le vieux Genlis [furent] directeurs en Catalogne, avec Nanclas et le marquis du Gambout sous eux; et en Italie Larré et Saint-Sylvestre, et Villepion-Chartaigne et le comte de Chamilly sous eux.

Avant de quitter la guerre de cette année, il la faut finir par un étrange incident. M. de Noailles et M. de Barbezieux étaient fort mal ensemble: tous deux bien avec le roi, tous deux hauts, tous deux gâtés. M. de Noailles avait soutenu et obtenu quantité de choses dans son gouvernement de Roussillon, qui l'y rendaient fort maître et fort indépendant du secrétaire d'État de la guerre. Mme de Maintenon, ennemie de M. de Louvois, l'y avait aidé, et le fils encore moins autorisé que le père n'avait pu y rien changer. Il n'aimait point M. de Luxembourg, très lié à M. de Noailles, et de tout cela naissait un groupe de chaque côté qui se regardait fort de travers.

Les succès de M. de Noailles, cette année en Catalogne, avaient outré Barbezieux. Il en craignait de nouveaux comme des avant-coureurs de sa perte, par le crédit augmenté de ses ennemis. Tout ce qui avait été exécuté en Catalogne aplanissait les voies du siège de Barcelone, et cette conquête mettait le sceau à celle de toute cette principauté, et mettait le roi en état d'attaquer avec succès à la fin de l'hiver le coeur de l'Espagne. Il avait toujours eu ce but, et M. de Noailles qui savait par le roi même l'affection qu'il avait à ce projet, et qui en vit enfin les moyens si avancés, n'en souhaitait pas moins l'exécution, et avec d'autant plus d'ardeur, qu'elle assurerait solidement la vice-royauté qu'il avait obtenue, augmenterait son éclat et sa faveur, et le rendait nécessairement le général de l'armée qui attaquerait l'année suivante l'Espagne, par les endroits les plus sensibles et les plus aisés à pénétrer, et à la forcer à demander la paix dont il aurait toute la gloire. Il pressa donc le roi de donner ses ordres à temps pour le mettre en état d'entreprendre ce siège avec sûreté, et M. de Barbezieux qu'il mettait au désespoir n'osait manquer â ce qui lui était prescrit, et qui était éclairé par le double intérêt de M. de Noailles de ne manquer de rien à temps, et de ne le pas ménager s'il n'avait toutes choses à point.

Une flotte de cinquante-deux vaisseaux partit le 3 octobre de Toulon, chargée de cinq mille deux cents hommes de troupes prises en Provence de celles de M. de Vendôme; et rien ne manquait plus que de mettre la main à l'oeuvre, lorsque M. de Noailles voulut rendre au roi un compte particulier de tout et recevoir directement ses ordres, et le tout à l'insu de M. de Barbezieux. Pour une commission si importante pour lui, il choisit Genlis qui, étant sans bien et sans fortune, s'était donné à lui, et qu'il ne faut pas confondre avec le vieux Genlis dont j'ai parlé plus haut et à qui il ne cédait point. Ce Genlis gagna l'amitié de M. de Noailles jusqu'à faire la jalousie de toute sa petite armée. M. de Noailles lui procura un régiment et le poussa fort brusquement à la brigade, puis à être fait maréchal de camp. Il avait de l'esprit et du manège, et n'avait d'autre connaissance ni d'autre protection que celle dont il avait tout reçu. M. de Noailles crut donc ne pouvoir mieux faire que de le charger d'une simple lettre de créance pour le roi, et de le lui annoncer comme une lettre vivante qui répondrait à tout sur-le-champ, et qui sans l'importuner d'une longue dépêche lui en dirait plus en une demi-heure qu'il ne pourrait lui en écrire en plusieurs jours. Les paroles volent, l'écriture demeure; un courrier peut être volé, peut tomber malade et envoyer ses dépêches; cet expédient obviait à tous ces inconvénients et laissait M. de Barbezieux dans l'ignorance et dans l'angoisse de tout ce qui se passerait ainsi par Genlis.

Barbezieux qui avait d'autant plus d'espions, et de meilleurs en Catalogne, que c'était pour lui l'endroit le plus dangereux, fut averti de l'envoi de Genlis et du jour de son départ, et sut de plus qu'il devait arriver droit au roi, et que surtout il avait défense de le voir en tout. Là-dessus il prit un parti hardi, il fit attendre Genlis aux approches de Paris, et se le fit amener chez lui à Versailles sans le perdre un moment de vue. Quand il le tint, il le cajola tant et sut si bien lui faire sentir la différence pour sa fortune de l'amitié de M. de Noailles, quelque accrédité qu'il fût, d'avec celle du secrétaire d'État de la guerre et de sa sorte et de son âge, qu'il le gagna au point de l'embarquer dans la plus noire perfidie, de ne voir le roi qu'en sa présence et de lui dire tout le contraire de sa commission. Barbezieux lui prescrivit donc tout ce qu'il voulut après avoir tiré de lui tout ce dont il était chargé, et en fut pleinement obéi. Par ce moyen le projet du siège de Barcelone fut entièrement rompu sur le point de son exécution, et avec toutes les plus raisonnables apparences d'un succès certain, et sans crainte d'aucuns secours, dans l'état des forces de l'Espagne sur cette frontière comme abandonnée depuis leur défaite; et M. de Noailles demeuré chargé auprès du roi de toute l'iniquité et du manquement d'une telle entreprise, par cette précaution-là même qu'il avait prise de ne donner qu'une simple lettre de créance, en sorte que tout ce que dit Genlis, directement opposé à ce dont il était chargé, n'eut point de contradicteur, et passa en entier pour être de M. de Noailles et pour son propre fait. On peut croire que Barbezieux ne perdit pas de temps à expédier les ordres nécessaires pour dissiper promptement tous les préparatifs, et de procurer à la flotte ceux de regagner Toulon. On peut juger aussi quel coup de foudre ce fut pour M. de Noailles, mais l'artifice avoir si bien pris qu'il ne put jamais s'en laver auprès du roi; on en verra les suites qui servirent de base à la grandeur de M. de Vendôme.

Vers ce temps-ci la capitation [37] fut établie. L'invention et la proposition fut de Basville, fameux intendant de Languedoc. Un secours si aisé à imposer d'une manière arbitraire, à augmenter de même, et de perception si facile, était bien tentant pour un contrôleur général embarrassé à fournir à tout. Pontchartrain néanmoins y résista longtemps et de toutes ses forces, et ses raisons étaient les mêmes que je viens de rapporter. Il en prévoyait les terribles conséquences, et que cet impôt était de nature à ne jamais cesser. À la fin, à force de cris et de besoins, les brigues lui forcèrent la main.

Le 27 novembre, M. le comte de Toulouse qui avait acheté le duché-pairie de Damville, et en avait obtenu une érection nouvelle en sa faveur, fut reçu en cette qualité au parlement, comme l'avait été M. du Maine et après lui M. de Vendôme. La planche faite par M. du Maine comme il a été dit, le roi avait cessé de faire inviter les pairs par M. de Reims, pour M. de Vendôme qui les visita, ce qui n'avait pas été hasardé la première fois. M. le comte de Toulouse les visita, comme avait fait M. de Vendôme, et MM. du parlement. Peu de pairs osèrent ne s'y pas trouver. Il fut peu de jours après installé, comme amiral de France, à la table de marbre [38] par le premier président. M. de Vendôme, grand-père de celui-ci, y avait été installé en la même qualité par un conseiller.

M. de Luxembourg fit en arrivant un étrange mariage pour sa fille. On a vu ci-dessus la mort du dernier de tous les Longueville, et son testament en faveur de M. le prince de Conti, son cousin germain. Mme de Nemours était sa soeur du premier lit, fille de la soeur de la princesse de Carignan et du dernier prince du sang de la branche de Soissons, tué en 1641 à la bataille de Sedan, sans avoir été marié. Mme de Nemours était veuve sans enfants du dernier des ducs de Nemours de la maison de Savoie. C'était une femme fort haute, extraordinaire, de beaucoup d'esprit, qui se tenait fort chez elle à l'hôtel de Soissons, où elle ne voyait pas trop bonne compagnie. Riche infiniment et vivant très magnifiquement, avec une figure tout à fait singulière et son habit de même, quoique sentant fort sa grande dame. Elle avait hérité de la haine de la branche de sa mère contre celle de Condé; elle s'était fort accrue par l'administration des grands biens de M. de Longueville, qu'après la mort de sa mère, soeur de M. le Prince, le même M. le Prince avait emportée sur elle, et M. le Prince son fils après lui. Le testament fait en faveur de M. le prince de Conti ne la diminua pas. Il s'en trouva un postérieur fait en faveur de Mme de Nemours; elle prétendit le faire valoir et anéantir le premier. M. le prince de Conti soutint le sien et disputa l'autre comme fait depuis la démence: cela forma un grand procès.

Dans la colère où il mit Mme de Nemours et dans le mépris où elle avait toujours vécu pour ses héritiers, elle déterra un vieux bâtard obscur du dernier comte de Soissons, frère de sa mère qui avait l'abbaye de la Couture du Mans, dont il vivait dans les cavernes. Il n'avait pas le sens commun, n'avait jamais servi, ni fréquenté en toute sa vie un homme qu'on pût nommer. Elle le fit venir, loger chez elle, et lui donna tout ce qu'elle pouvait donner et en la meilleure forme, et ce qu'elle pouvait donner était immense. Dès lors elle le fit appeler le prince de Neuchâtel, et chercha à l'appuyer d'un grand mariage. Mlle de Luxembourg n'était rien moins que belle, que jeune, que spirituelle; elle ne voulait point être religieuse et on ne lui voulait rien donner. La duchesse de Meckelbourg dénicha ce nouveau parti. Son orgueil ne rougit point d'y penser, ni celui de M. de Luxembourg son frère, à qui elle en écrivit; mais il palpita assez pour oser se proposer un rang en considération de ce mariage, sous prétexte de la souveraineté de Neuchâtel donnée à ce bâtard qui en portait déjà le nom. M. de Luxembourg, qui, en partant, avait obtenu une grande grâce qui était encore secrète et dont je parlerai bientôt, n'osa proposer celle-ci, et en laissa la conduite à l'adresse de sa soeur; et, pour éviter tout embarras entre le demander et ne le demander point, il ne parla point au roi de ce mariage par aucune de ses lettres. Il avait déjà transpiré avec l'idée du rang, lorsque Mme de Meckelbourg alla demander au roi la permission d'entendre à ce mariage. Au premier mot qu'elle en dit, le roi l'interrompit et lui dit que M. de Luxembourg ne lui en avait rien mandé; qu'il n'empêcherait point qu'elle ne fit là-dessus ce que son frère et elle jugeraient à propos, mais qu'au moins il comptait bien qu'ils n'imagineraient pas de lui demander un rang pour le chevalier de Soissons sous aucun prétexte, à qui il n'en accorderait jamais, et barra ainsi cette belle chimère. Le mariage ne s'en fit pas moins, et il fut célébré au plus petit bruit à l'hôtel de Soissons, dès que M. de Luxembourg fut arrivé. Mme de Nemours logea les mariés et les combla d'argent, de présents et de revenus, en attendant sa succession, et se prit de la plus parfaite affection pour le mari et pour la femme qui se renfermèrent auprès d'elle, et ne virent d'autre monde que le sien.

Suite
[37]
La capitation était un impôt personnel, payé par tête (caput), comme l'indique le mot capitation, sans distinction de rang ni de condition. Les pauvres, les ordres mendiants et ceux dont la contribution personnelle n'atteignait pas quarante sous, en furent seuls exempts. Tous les autres Français furent divisés en vingt-deux classes et soumis à une taxe proportionnée à leur fortune. Ce projet ne fut qu'imparfaitement exécuté: le clergé se racheta de la capitation par un don gratuit; la noblesse eut des receveurs spéciaux; les parlements et autres tribunaux obtinrent de faire eux-mêmes la répartition de leur capitation; enfin les provinces, qui avaient conservé leurs assemblées et qu'on appelait pays d'états, parvinrent à se racheter de la capitation en payant une certaine somme pour toute la province.
[38]
Voy., sur la table de marbre, les notes à la fin du volume.