1713
Menées sourdes et profondes du P. Tellier et de Bissy, évêque de Meaux. — Voysin substitué à Torcy pour les .affaires du cardinal de Noailles. — Bissy nommé au cardinalat. — Projet énorme du P. Tellier. — L'affaire du cardinal de Noailles portée à Rome. — P. Daubenton et Fabroni; quels. — Ils dressent seuls, et en secret, la constitution Unigenitus. — Le pape engagé de parole positive à ne donner sa constitution que de concert et approuvée du cardinal de La Trémoille en particulier, et du sacré collége en général. — Audacieuse visite du P. Tellier au cardinal de Rohan. — Caractère du cardinal de Rohan; son éducation. — Il doit tout au cardinal de Noailles. — Priviléges de la vie des cardinaux. — Combat intérieur du cardinal de Rohan. — Tallard entraîne le cardinal de Rohan au P. Tellier. — Cardinal de Rohan grand aumônier. — Cardinal de Polignac maître de la chapelle du roi. — Orgueil de son serment. — Il reçoit le bonnet de la main du roi; il le harangue à la tête de l'Académie française sur la paix. — Vittement recteur de l'Université; sa belle harangue et son très-singulier effet.
Le P. Tellier avançait à grands pas vers le but qu'il s'était proposé toute sa vie, pour lequel il avait travaillé sans cesse dans l'obscurité du cabinet, et sa place et le crédit prodigieux qu'il y avait acquis le mettaient en état de tout oser pour y arriver. On a vu le caractère terrible de ce jésuite; les conjonctures lui étaient les plus favorables pour le grand projet qu'il avait formé. Il avait affaire à un prince qui, de son aveu même, était de la plus profonde ignorance, élevé par la reine sa mère dans l'opinion que ce qu'on appelait jansénistes était un parti républicain dans l'Église et dans l'État, ennemis de son autorité qui était son idole, inaccessible toute sa vie à tout ce qui n'était pas entièrement dévoué au parti opposé, accoutumé par les idées ultramontaines de la reine sa mère, et du cardinal Mazarin, à tout céder à la cour de Rome, et à déployer son autorité sur les parlements pour les y faire fléchir; à exiler, même à emprisonner les particuliers qui par de savants écrits blessaient Rome en s'élevant contre ses usurpations sur l'Église et sur les couronnes; soigneusement entretenu dans cet esprit par ses confesseurs toujours jésuites, et par Mme de Maintenon, gouvernée depuis si longtemps par le même esprit, qui était celui de M. de Chartres, son ancien directeur de toute confiance et de tout Saint-Sulpice, à qui M. de Chartres l'avait comme léguée en mourant, entre les mains du curé La Chétardie, et de Bissy, évêque de Toul, puis de Meaux, qui, par le voisinage si proche de ce dernier diocèse, ne la perdait presque pas de vue.
Bissy, dont l'âme était forcenée d'ambition, sous le pharisaïque extérieur d'un plat séminariste de Saint-Sulpice, était de tout temps abandonné aux jésuites comme à ceux dont il attendait tout pour sa fortune, et sans lesquels il sentait qu'il ne pouvait rien se promettre par lui-même, sans famille, sans amis, sans accès, et relégué à Toul, où il n'était pas même du clergé de France. On a vu en son temps combien il y exerça la patience de M. de Lorraine, pour se faire transférer ailleurs par ses cris; l'usage qu'il en sut faire à Rome, où il entretint un agent exprès pour se débrouiller un chemin au cardinalat, appuyé des jésuites; et comme il ne voulut point de Bordeaux, trop éloigné de la cour, quand il s'y vit si bien produit par M. de Chartres, et que ses affaires à Rome par rapport à la Lorraine et à ses espérances prenaient un tour à ne lui plus faire regarder Toul comme un cul-de-sac, et à ne lui plus permettre de quitter cet évêché que pour quelque autre qui favorisât encore mieux ses espérances, tel que fut Meaux.
Il était trop initié pour ignorer l'aversion de Mme de Maintenon et même de Saint-Sulpice pour les jésuites; il était aussi trop habile pour se refroidir avec des amis immortels, et d'une puissance permanente, pour épouser la fantaisie d'une femme qui, à son âge, pouvait manquer à tous moments, et d'une troupe de barbes sales, qui sans elle n'avait point de consistance, et que les jésuites tôt ou tard crosseraient avec le pied.
Il cacha donc à Mme de Maintenon, qui, par la mécanique de ses journées, ne voyait le jour que par le trou d'une bouteille, et qui était la plus grande dupe du monde de ceux pour qui elle se prévenait, il lui cacha, dis-je, son union ancienne et la plus intime avec les jésuites comme tels, et ne lui laissa voir de liaison entre lui et le P. Tellier, que par la nécessité du concert pour la bonne cause, pour l'Église, pour la pureté de la doctrine, c'était à dire contre le cardinal de Noailles; et il lui en faisait d'autant mieux sa cour, que Mme de Maintenon, peu à peu tombée dans le dernier emportement sur cette affaire, était bien aise d'être informée des démarches du P. Tellier auprès du roi, pour agir de concert et en conséquence, de croire même les diriger sans toutefois vouloir ni voir ni ouïr parler du P. Tellier, ni qu'il sût rien qu'en gros, et pour la nécessité seulement par rapport à elle et sans elle; et c'est ce qu'elle croyait faire par Bissy, sans s'être jamais doutée qu'ils ne fussent tous deux qu'un cœur et qu'une âme, ni qu'il fût livré aux jésuites.
D'autre part, le P. Tellier faisait faire tout ce qu'il voulait par Mme de Maintenon auprès du roi sur cette affaire, par le même Bissy, sans y paraître. Par ces manéges obscurs ils conduisirent où ils voulurent un roi enfermé à cet égard sous leur clef, et qui pour ministre de tout ce qui regardait cette affaire, n'avait plus Torcy qu'ils avaient rendu suspect par son alliance avec les Arnauld, et par l'évêque de Montpellier son frère. Ils lui avaient substitué Voysin, créature et âme damnée de Mme de Maintenon et de sa fortune, et aussi ignorant d'ailleurs et aussi vendu qu'il le leur fallait. De cet antre de ténébreuse intrigue, sortit la nomination de Bissy au cardinalat, que sans concert, mais avec une ardeur égale, Mme de Maintenon et le P. Tellier procurèrent également, et que Rome reçut avidement, comme de celui dont elle ferait le plus grand usage, et qui pour elle foulerait tout aux pieds. Ce fut un grand pas pour le P. Tellier, dont il se promit toutes choses, mais il en voulait tant opérer à la fois, qu'il crut avoir besoin d'un renfort de secours.
Le premier plan sur lequel il avait travaillé n'avait été, comme on l'a dit, que pour donner des morailles au pape, et lui donner des affaires en France qui le forçassent de ménager les jésuites et d'abandonner leurs affaires des cérémonies chinoises, dès lors réduites pour eux à un état désespéré. La double vue était de se venger du cardinal de Noailles, monté sans eux sur le siége de la capitale, et dont la faveur et l'estime balançait leur pouvoir sur la distribution des bénéfices. Parvenus à lui soustraire grand nombre d'adhérents pour avoir reconnu sa faiblesse, et l'avoir manifestée au monde, par le consentement que le roi lui arracha pour la radicale destruction de Port-Royal des Champs, et bientôt après à le brouiller avec Mme de Maintenon, jusqu'à la rendre sa plus ardente ennemie, et de là avec le roi, sur les Reflexions morales du P. Quesnel, Tellier se promit toutes choses de l'affadissement du sel de la terre, qu'il reconnut en plein dans les assemblées des évêques sur cette affaire. L'interdiction générale de la chaire et du confessionnal de tous les jésuites du diocèse de Paris, excepté du confesseur unique du roi, et pour le roi tout seul, combla la mesure du désir de la plus éclatante vengeance dans les jésuites et dans le P. Tellier, et la déplorable conduite du cardinal de Noailles qui, dans la suite, se sépara de ses évêques, de son chapitre, des écoles, et des corps des curés et des congrégations régulières qui étaient toute sa force au dedans et tout son appui au dehors, porta les vues du P. Tellier au plus haut point de ses désirs. Tout ce qu'il voulait était de mettre un tel trouble et une telle division dans cette affaire, qu'on fût obligé de la porter à Rome contre toutes les lois de l'Église, tout usage et toute raison, qui veulent que les contestations soient nettement jugées, et juridiquement, dans les lieux où elles naissent, sauf l'appel au pape qui, par ses légats envoyés sur les lieux, revoit et réforme le premier jugement, ou le confirme d'une manière aussi juridique. Or cette forme juridique ne peut être autre qu'un concile, où l'auteur d'un livre qui excite la contestation soit appelé et pleinement entendu, pour rendre raison lui-même de sa foi, et des termes et du sens des propositions qui sont examinées, comme le P. Quesnel vivant lors ne cessait de le demander de vive voix, et de le requérir expressément par écrit, au pape et aux évêques, ou quand l'auteur est mort, d'entendre en sa place ceux qui en veulent prendre la défense. Ce n'était pas là le jeu du P. Tellier. Il ne savait que trop penser du succès de cette affaire traitée de la sorte. Il la voulait étrangler par autorité, et s'en faire après une matière de persécution à longues années, pour établir en dogme de foi leur école, à grand'peine jusqu'alors tolérée dans l'Église.
Son dessein, en faisant renvoyer l'affaire au pape, fut donc de le faire prononcer par une constitution qui, en condamnant un grand nombre de propositions tirées de ce livre, les condamnât d'une façon atroce, mît par leurs contraires l'école de Molina en honneur, et en dogme implicite, en ruinant toutes les écoles catholiques uniquement écoutées et suivies dans l'Église, et comme cela ne se pouvait espérer en termes clairs, qui auraient porté leur propre anathème sur le front, il voulut une condamnation in globo qui, en n'épargnant rien et tombant sur tout, se pût sauver par un vague qui se pouvait appliquer ou détourner suivant le besoin, et par là même hasarder de condamner dans ce livre des propositions purement extraites de saint Paul et d'autres endroits de l'Écriture, et d'autres de saint Augustin et d'autres Pères en termes formels, qui est la première fois qu'on l'ait osé, pour tirer de là des conséquences nécessaires en faveur de Molina contre saint Augustin, saint Thomas et toutes les autres écoles, et à la longue parvenir par degrés à faire ériger les propositions de l'école de Molina, les plus opposées à toutes les autres écoles, en dogmes, et flétrir par conséquent tout ce qui au contraire a servi de règle jusqu'à présent dans l'Église.
Pour atteindre à ce but, il fallait autant d'adresse et de ténèbres que d'audace dans la manière de dresser la bulle ou constitution, la dérober aux cardinaux et aux théologiens de Rome, surtout aux partisans sans nombre de saint Augustin et de saint Thomas, y flatter Rome et le pape sur les plus énormes prétentions ultramontaines, assez solidement pour attacher leur plus vif intérêt au maintien de cette pièce sans toutefois que cela fût assez grossier pour choquer le roi, ou se mettre en danger que les parlements le pussent vaincre à cet égard, et pourtant la fabriquer de manière que le pape se trouvât engagé en des condamnations tellement insoutenables, qu'il se sentît hors de moyens d'en pouvoir donner aucune explication si les évêques de France s'avisaient de lui en demander, et que la superbe de sa prétendue infaillibilité l'empêchât toujours de souffrir que d'autres attentassent à interpréter eux-mêmes, que par là il se roidît à la faire recevoir purement et simplement, et que les jésuites, ayant pour eux le pape et Rome également intéressés pour leur pouvoir, et pour leur embarras, le roi en France engagé dès en la demandant à la faire recevoir, et trop entêté de son autorité pour n'y pas employer toute sa puissance, ils eussent par là une préférence de leur école sur les ruines de toutes les autres, qui portée par les deux puissances également, éblouirait l'ignorance ou la faiblesse des évêques, attirerait les autres par l'ambition, forcerait tout théologien d'être publiquement pour ou contre, grossirait infiniment leur parti, et leur donnerait lieu d'anéantir l'autre une fois pour toutes par une inquisition et une perquisition ouverte contre des gens également en butte à l'autorité de Rome et à celle du roi; par là accoutumer toute tête à ployer sous ce joug, et de degré en degré l'ériger en dogme de foi, et c'est là malheureusement où aujourd'hui nous en sommes.
La division habilement semée dans les divers partis parmi les évêques assemblés en diverses façons sur cette affaire, tous ne crurent plus en pouvoir sortir que par Rome. Le roi écrivit donc au pape de la façon la plus pressante pour lui demander une décision, mais de la manière la plus partiale contre le livre du P. Quesnel. Le pape s'en crut quitte par la condamnation qu'il en fit à laquelle le cardinal de Noailles adhéra en retirant l'approbation qu'il y avait autrefois donnée. Mais ce qui suffisait en soi n'était pas le compte du P. Tellier. Il voulut une constitution qui condamnât une foule de propositions extraites de ce livre; en la manière et par les raisons qui viennent d'être expliquées. Le roi redoubla d'instances auprès du pape, et le P. Telier, pour les mettre l'un et l'autre hors d'état de pouvoir reculer dans les suites, fit en sorte que le roi répondît au pape sur son autorité dans son royaume, que sa constitution y serait reçue sans difficulté de quelque part que ce fût.
Le P. Tellier n'eut pas à Rome des conjonctures moins favorables qu'en France. Le P. Daubenton dont j'aurai occasion de parler ailleurs, plus savant, plus accort, plus rompu au monde et aux cours, mais au fond non moins déterminé jésuite que le P. Tellier, congédié de confesseur du roi d'Espagne par les intrigues de Mme des Ursins à qui son crédit et ses manéges firent ombrage, était passé en Italie où il restait assistant français du général des jésuites, qui est pour chaque grande nation la première place après la sienne. Il était donc à Rome, et il y vivait comme les plus importants de ses confrères et les plus initiés dans les mystères les plus secrets de leur compagnie, dans la plus étroite liaison et la plus réciproque confiance avec le cardinal Fabroni. J'ignore s'il était de ceux que les jésuites savent s'approprier à Rome, depuis les plus éminents personnages jusqu'aux plus obscurs par leurs présents, et les pensions proportionnées à l'état et au service qu'ils en tirent. Cette politique ne leur est pas nouvelle, et les a de tout temps bien utilement servis, elle n'est pas même ignorée; mais ni ceux qu'ils soudoient, ni ceux qui sont soudoyés, n'ont garde de s'en vanter. À l'égard de Fabroni, la mince fortune où il est né, celle qu'il a faite, l'appui déclaré qu'il a trouvé chez les jésuites dans tous les temps de sa vie, celui qu'il leur a rendu à découvert aussitôt qu'il s'est vu en état de le faire, l'application, la suite et souvent la fureur qu'il a montrée à soutenir toutes leurs causes, tous leurs intérêts, ceux même des personnes en qui ils en ont pris, ont pu faire croire qu'il ne leur était pas vendu pour rien, parce qu'il est vrai et public, et lui-même ne s'en cachait pas, qu'il était plus ardent jésuite que les plus forcenés de l'espèce même du P. Tellier, et plus occupé qu'eux-mêmes de leurs affaires.
C'était un bourgeois de Pistoie, venu à Rome avec de l'esprit, de la scolastique, du feu, de l'application au travail le plus ingrat, et la résolution de percer à quelque prix que ce pût être. Porté constamment par les jésuites, il parvint à quarante ans à être, en 1691, secrétaire des mémoriaux, et quatre ans après secrétaire de la congrégation de la propagation de la foi, où il eut moyen de déployer son savoir-faire en faveur de ses patrons. On ne connaît plus à Rome que le droit canon, et à leur mode, et la scolastique. Le cardinal Albane, qui était jeune et peu foncé, se livra à Fabroni pour le conduire dans sa fonction de secrétaire des brefs; il s'en trouva bien. Il s'accoutuma si fort à le consulter dans la suite, et peu à peu il se laissa tellement subjuguer à cet esprit haut et violent, qu'il devint son maître. Devenu pape, il le fit cardinal, et augmenta ainsi sa servitude. Fabroni et Daubenton firent donc le projet de la constitution par ordre du pape.
Le roi avait demandé qu'elle fût concertée avec le cardinal de La Trémoille, tant à l'égard du fond même que pour éviter ce qui y pourrait causer de l'embarras par rapport aux maximes de France. L'affaire faisait du bruit. Une décision dogmatique, et en première instance pour la France, réveilla la cour de Rome; le sacré collége prétendit la chose assez importante, et même précisément de nature à être consultée; plusieurs des plus anciens et des plus considérables en parlèrent au pape qui trouva juste d'en avoir leur avis, et qui leur promit à tous de la manière la plus positive que le projet de cette constitution leur serait présenté, qu'ils le pourraient examiner chacun en particulier à leur gré, puis s'assembler plusieurs en congrégations différentes, et qu'elle ne serait dressée que conformément à l'avis du plus grand nombre des cardinaux. Le pape donna la même parole au cardinal de La Trémoille pour ce qui le regardait, comme chargé des affaires du roi. Les choses en étaient là lors de la mort du cardinal de Janson et de la nomination de Bissy au cardinalat.
Quelque puissant renfort que le P. Tellier comptât bien de trouver dans l'élévation de Bissy à la pourpre, la grandeur et l'étendue de ce qu'il se proposait lui parut mériter de ne pas négliger de se rassembler toutes les forces qu'il pourrait. L'éclat où se trouvait le nouveau cardinal de Rohan par les établissements de sa maison, de ses alliances, de ses liaisons, plus encore le parti qu'il se proposait de tirer en se l'acquérant, du goût personnel du roi pour le fils de Mme de Soubise, et de prendre ainsi le roi de toutes parts, engagea ce hardi jésuite à n'en pas faire à deux fois, et de faire montre de toute sa puissance au cardinal de Rohan, pour le mettre de son côté par la crainte, et par la récompense toute présente. Il l'alla voir et lui exposa tout net ses intentions avec une audace et une autorité qui ne craignait rien. Il lui dit donc qu'il ne pouvait douter qu'instruit comme il l'était, il ne pensât comme il devait sur l'affaire de l'Église qui était portée à Rome, mais qu'il ne suffisait pas à un homme établi comme il l'était de bien penser, comme il supposait et voulait se persuader qu'il pensait bien, mais qu'il fallait encore bien faire, non-seulement bien faire, mais tout faire, tout entreprendre, tout exécuter pour mettre la bonne doctrine à couvert, et pour écraser une fois pour toutes ce parti séditieux qui troublait l'Église depuis si longtemps; que le roi y était entièrement disposé, que le succès en était assuré, que c'était à lui de voir quel parti il voulait y prendre, se perdre auprès du roi à qui il devait tout, et de qui il se pouvait, en se conduisant bien, se promettre encore bien davantage, ou demeurer dans une neutralité qui ne pourrait pas se soutenir longtemps, et qui le déshonorerait et lui ôterait en attendant toute considération; ou enfin, s'attacher au devoir de son état, de sa reconnaissance pour le roi, en se déclarant pour l'Église et pour la bonne cause, et pour ne lui rien celer, en n'y ménageant rien et en marchant dans un concert intime, entier, inaltérable, avec ceux qui en faisaient leur affaire, et qui lui répondaient en prenant ce parti, mais en s'y engageant de la sorte, qu'il pouvait compter sur la charge de grand aumônier, et sur tous les agréments, les grâces, les privances et toute la confiance du roi. Rohan fut étrangement étourdi d'un compliment si net, et qui lui présentait si à découvert la paix ou la guerre. Il balbutia, et dans son trouble il ne put rien tirer de lui-même que des compliments, et tout ce que l'incertitude et l'étonnement put couvrir sous les plus grandes politesses. Ce n'était pas la monnaie dont Le Tellier se payait; il se leva froidement, dit au cardinal qu'il s'aviserait; que, comme il désirait d'être son serviteur, il souhaitait et il espérait que ce serait bien, et que, lorsque ses réflexions seraient faites, il comptait qu'il lui en ferait part, mais qu'il devait l'avertir de ne les pas faire longues, parce que la charge de grand aumônier ne pouvait vaquer longtemps. Il se retira en même temps, et laissa le cardinal épouvanté d'une déclaration si audacieuse.
Le cardinal de Rohan était net avec de l'esprit naturel, qui paraissait au triple par les grâces de sa personne, de son expression, du monde le plus choisi dont le commerce l'avait formé, par les intrigues et les liaisons où Mme de Soubise l'avait mis de fort bonne heure. Son naturel était bon, doux, facile, et sans l'ambition et la nécessité qu'elle impose, il était né honnête homme et homme d'honneur; d'ailleurs d'un accès charmant, obligeant; d'une politesse générale et parfaite, mais avec mesure et distinction; d'une conversation aisée, douce, agréable. Il était assez grand, un peu trop gros, le visage du fils de l'Amour, et outre la beauté singulière, son visage avait toutes les grâces possibles, mais les plus naturelles, avec quelque chose d'imposant et encore plus d'intéressant, une facilité de parler admirable et un désinvolte merveilleux pour conserver tous les avantages qu'il pouvait tirer de sa princerie et de sa pourpre, sans montrer ni affectation ni orgueil, et n'embarrasser ni lui-même ni les autres; attentif surtout à se mettre bien avec les évêques, à se les attirer et à se conserver l'attachement de toute la gente doctrinale, qu'il s'était fait un capital de s'acquérir sur les bancs, et à quoi il avait parfaitement su réussir.
Il était de juin 1674. Le cardinal de Noailles était dans l'apogée de sa faveur lorsqu'il fut question de séminaire et de théologie pour l'heureux fils de la belle Soubise. Elle avait su toute sa vie ménager tout, et sa faveur extrême et déclarée et toujours soutenue, lui avait tout facilité. Elle était donc bien de tout temps avec les Noailles, trop clairvoyants pour ne pas désirer encore plus d'être de ses amis. Par eux et par Mme de Maintenon même, à qui elle en fit sa cour, elle donna son fils au cardinal de Noailles dès son entrée dans l'archevêché de Paris, et le lui remit pour se reposer entièrement sur lui de toute son éducation ecclésiastique. Ces considérations engagèrent ce prélat d'en faire comme de son neveu; et cet intrus neveu, déjà fait aux manéges de sa mère, n'oublia rien pour faire du prélat comme d'un véritable oncle en toutes choses, parce qu'il sentit que sa fortune en dépendait et qu'elle ne pouvait être que grande et prompte, s'il engageait par sa conduite cet oncle adoptant à la vouloir. Il le mit à Saint-Magloire dont il fit son séminaire de confiance, choisit des gens pour former et veiller sur ses mœurs et ses études, et pour lui en rendre un compte particulier. Les charmes de la personne de l'élève furent secondés par tout l'art d'une conduite qui répondit en tout aux vastes desseins de sa mère sur lui, et la facilité de son esprit à tout ce qu'on lui voulut apprendre. Son application, ses progrès, sa modestie, sa politesse, son attention à plaire, lui gagnèrent ses maîtres et tout Saint-Magloire, et prêtres de l'Oratoire et séminaristes. Il se fit une réputation. Il ne fut pas moins adroit, ni moins attentif en Sorbonne, ni avec moins de succès. Il travailla de bonne foi à apprendre; et en effet il acquit de la science qu'il sut tripler par la grâce et la facilité de son débit, et tellement gagner ce peuple lettré, que, tout grossier, pédant et farouche qu'il soit de sa nature, il ne voulut que l'admirer et le vanter. Tant de bons témoignages ne demeurèrent point oisifs. Noailles se faisait un plaisir de les porter au roi et à Mme de Maintenon, charmé lui-même de son élève, et le roi plus content encore d'avoir tant où s'appuyer pour travestir en justice les inclinations et les penchants de son cœur.
Mme de Soubise était morte dans l'attachement et la reconnaissance pour le cardinal de Noailles, sans lequel elle sentait que toute sa faveur et toute la volonté du roi aurait été peu fructueuse, et elle avait inculqué ces sentiments à son fils, dont l'âge et le chemin ne semblaient pas pouvoir entrer jamais en opposition avec un bienfaiteur à qui il devait tant, et à qui il se ferait toujours tant d'honneur de rendre.
De si fortes raisons s'appuyaient dans le cardinal de Rohan par d'autres plus touchantes. Prince avec sa maison par la grâce du roi et la beauté de sa mère, des biens immenses et de grands établissements y étaient entrés. Il avait passé sa première jeunesse sous la férule, dans le travail, dans toutes sortes de contraintes pour arriver à une grande fortune. Il y était parvenu avec rapidité, que ses mœurs, délivrées d'Argus, ne lui avaient pas procurée. Il se voyait avant quarante ans évêque de Strasbourg et cardinal, avec plus de quatre cent mille livres de rente, le goût des plaisirs, de la magnificence, du repos, après tant de travaux si contraires à sa paresse naturelle. Il lui semblait qu'il n'avait plus rien à désirer qu'à jouir d'un état où tout est devenu permis, et où on n'a plus à compter avec personne. Un cardinal est en droit de passer sa vie au jeu, à la bonne chère et avec les dames les plus jeunes et les plus jolies; d'avoir sa maison pleine de monde pour le rendez-vous et la commodité des autres, de leurs amusements, de leurs plaisirs et pour le centre des siens; d'y donner des bals et des fêtes, et d'y étaler tout le luxe et la splendeur en tout genre qui peut flatter, surtout de n'entendre plus parler de livres, d'étude, de rien d'ecclésiastique; d'aller régner dans son diocèse sans s'en mêler; de n'en être pas seulement importuné par ses grands vicaires, ni par le valet sacré et mitré payé pour imposer les mains; et d'y vivre sans inquiétude dans un palais à la campagne, au milieu d'une cour, comme un souverain, parmi le jeu, les dames et les plaisirs, pleinement affranchi là comme à Paris et à la cour de toute bienséance. Ce n'est pas que nos cardinaux vécussent tous de la sorte, mais ils en avaient toute liberté. Le cardinal de Bouillon en avait usé dans toute son étendue, et celui-ci en jouissait aussi pleinement; il était fait pour être et vivre en grand seigneur, et ne se refuser aucune chose: il avait de quoi y fournir parfaitement, et le roi, si volontiers austère pour les autres, était accoutumé, non-seulement à passer, mais à trouver tout bon des cardinaux. Il était bien doux à celui-ci de vivre de la sorte; c'était son penchant et son goût; c'était avec la haute fortune, cet état d'entier affranchissement qui le flattait le plus, et dont la perspective l'avait le plus soutenu dans le fâcheux chemin qui l'y avait fait atteindre. Que pouvoir se proposer de préférable à la jouissance d'un état si heureux qui ne voit rien au-dessus de soi, ni de plus libre, et quel prétexte d'en profiter en plein qui fût plus naturel et plus honnête que l'attachement et la reconnaissance pour un homme à qui il devait tout, du su de tout le monde, dont les mœurs et la conduite était en vénération la mieux établie; qui était son ancien d'âge de vingt-quatre ans, d'épiscopat de vingt-deux, de cardinalat de treize, archevêque de la capitale; uni et à la tête des plus saints et les plus savants corps et particuliers de Paris, auxquels tant d'autres des provinces se jaignaient, vers qui les premiers inclinaient, qui avait pour lui une famille puissante, et tout ce qui n'était pas esclave des jésuites, c'est-à-dire tous les honnêtes gens de tous états? Le cardinal de Rohan, entraîné par des raisons si homogènes à lui-même, trouva dans sa famille un homme qui n'y était pas nouvellement entré pour n'en pas profiter. Tallard, qui sut par le cardinal même et par le prince de Rohan l'insolence de la proposition du P. Tellier, trouva cette ouverture admirable, et le comble du bonheur des Rohan.
Plus le discours du confesseur avait eu la hauteur de celui d'un favori premier ministre, plus il en tira parti, pour montrer aux Rohan, d'un côté les enfers ouverts sous leurs pas, de l'autre les cieux qui les appelaient dans leur gloire. Il leur représenta l'intérêt et le naturel terrible du jésuite et des siens, Mme de Maintenon, que ce parti avait arrachée de l'estime, de l'amitié, de l'alliance et des liaisons de confiance les plus intimes du cardinal de Noailles, qui s'étaient changées en elle en fureur et en poursuite la plus à découvert et la plus violente, le roi qui avait hautement épousé ce parti, qui était exactement fermé à n'écouter que ceux qui y étaient les plus ardents, qui y avait mis son autorité et sa conscience, qui n'était occupé ni entretenu d'autre chose, qui regardait le parti opposé comme ennemi de l'Église et de l'État, comme républicain, comme ennemi de son autorité et de sa personne, et qui depuis son enfance était nourri dans ce préjugé contre tout ce que les jésuites voulaient traiter de jansénistes. Il leur fit peur par l'exemple du cardinal de Bouillon, qu'une semblable affaire, et toutefois sans ombre de jansénisme, et avec le confesseur pour lui, avait perdu pour l'archevêque de Cambrai, et dont eux-mêmes par l'affaire de Strasbourg avaient comblé la disgrâce, qui avait été au moment d'ôter le rang à sa maison. Il leur fit considérer que les neutres, surtout d'une considération en ce genre aussi rare qu'était la sienne, ne seraient regardés qu'avec dépit et mépris des deux côtés, outre que les occasions qui surviendraient chaque jour dans le cours de cette affaire lui rendraient la neutralité bien difficile à soutenir; que c'était à lui à se tâter lui-même pour voir s'il se croyait capable de soutenir tous les dégoûts, et de toute espèce, que le roi se plairait à faire tomber sur lui, et tous ceux encore qu'à l'abri de l'entier discrédit les jésuites sauraient lui susciter de toutes les façons, et par toutes sortes de canailles, qui aujourd'hui se croient honorés de le voir passer dans son antichambre.
Après l'avoir ébranlé de la sorte, Tallard lui fit honte de voir un autre que lui grand aumônier, et Bissy en sa place à la tête du parti favori, et en avoir toute l'autorité, le ralliement, la faveur, la confiance, les privances du roi, et de lui devenir nécessaire toute sa vie; tandis que lui-même serait au rebut, et aurait peut-être l'affront de voir Bissy entrer au conseil, lui qui se tiendrait heureux de lui porter partout son portefeuille, et disposer de toutes les grandes places de l'Église que le besoin continuel que le confesseur aurait de lui l'empêcherait de lui contester. De là, venant à toute la disproportion de Bissy à lui, il étala tous les avantages qu'il tirerait sans cesse pour les siens, s'il se mettait à la tête de ce parti, avec le goût que le roi avait pour lui et pour sa famille; qu'il serait en état de tout prétendre et de tout obtenir, et même avec apparence d'être porté jusque dans le conseil. Il ignorait sans doute, ou voulut ignorer, ce qui était échappé là-dessus au roi à l'égard du cardinal de Janson, rapporté ci-dessus.
Après avoir flatté le cardinal de Rohan de pouvoir mettre ainsi tout à ses pieds, il se moqua de sa délicatesse sur le cardinal de Noailles, qui n'en serait pas moins perdu quand il se perdrait avec lui, dont il ne serait et ne passerait jamais que pour le disciple, en se rangeant de son côté, ni pouvait jamais atteindre à aucun des avantages et de la considération qui se tirait de la qualité de chef de parti, qui demeureraient tous au cardinal de Noailles, par qui seul il végéterait, et au fond lui serait compté pour rien; au lieu que prenant le parti contraire, et dans ce parti se trouvant de bien loin sans égal en naissance, établissements, considération et dignité, il se verrait tout à coup vis-à-vis du cardinal de Noailles avec la supériorité que lui donnerait la faveur si déclarée du parti dont il serait le chef, et le chef sans collègue, parce que Bissy, devenu cardinal, ne pourrait en aucun genre approcher de sa distinction par tout, et par cette disproportion inhérente serait, malgré son âge, à son égard, moins que lui à celui du cardinal de Noailles, s'il avait la folie d'en préférer le parti.
Ce qui rendait Tallard si éloquent était son intérêt propre. Il ne s'était allié aux Rohan que pour en profiter. Il regardait leur faveur comme un chemin à lui ouvert pour tout. Il comprenait qu'aucun des deux frères n'entrerait dans le conseil, et la chose était visible. Mais lui qui avait passé par tous les genres d'affaires considérables, qui n'avait ni rang ni attachement étranger, qui avait vu Harcourt si souvent près d'y entrer et que sa santé mettait hors de toute portée, il se flatta que les jésuites feraient pour lui ce qu'ils ne pourraient pour le cardinal de Rohan, par leur intérêt propre. Il voulait la pairie, il voulait la survivance de son gouvernement, il voulait une grande charge; en un mot que ne voulait-il point, et que n'espérait-il point en mettant le cardinal de Rohan à la tête d'un parti qui pouvait et pourrait tout, et dont par là il espérait bien de se mêler! Enfin il acheva de déterminer le cardinal de Rohan, en lui persuadant qu'il n'aurait que l'honneur de la conduite de l'affaire et des assemblées, d'être à la tête du clergé de France, à la place du cardinal de Noailles, lui, à son âge, et qui par son siége n'était point de ce clergé ; qu'il en deviendrait le modérateur et l'arbitre; et que pour le travail il en chargerait des commissaires et des bureaux qui lui présenteraient la besogne toute faite, dont il n'aurait que l'honneur. Ce point de paresse tenait fort le cardinal, et ce fut aussi celui que Tallard vainquit le dernier; mais son ambitieux bien-dire sut aussi en triompher, et jeter le cardinal de Rohan dans une fondrière, dont sa paresse et la flétrissure de son honneur lui ont coûté de sourds et de cuisants repentirs, et où sa vanité a eu fort à souffrir de l'égalité qu'à force de souplesse le cardinal de Bissy usurpa enfin pour le moins avec lui, dans la réalité de vrai chef de confiance de tout ce parti.
Le cardinal de Rohan, agité, battu plusieurs jours, ne put résister à son frère et à Tallard, que ce maréchal avait gagné. Son marché fut grossièrement conclu au mot du P. Tellier, dont il devint l'esclave en même temps qu'il prêta le serment de grand aumônier de France. Moins je prétends m'étendre sur l'histoire de la constitution même, qui remplit seule des in-folio, et plus je crois devoir en montrer les ténébreuses trames, auxquelles seules je crois devoir me restreindre. Quelque peu de cas que les jésuites fissent de l'esprit léger et du cœur encore plus volage du cardinal de Polignac, il était cardinal, et ils ne voulurent pas le mécontenter. La rage de courtisan, sous laquelle il gémit toute sa vie, lui avait fait passionnément désirer la charge de maître de la chapelle du roi, c'est-à-dire uniquement des musiciens de la chapelle, depuis qu'elle vaquait par la mort de l'archevêque de Reims. Devenu cardinal, il ne la souhaita pas moins, et, bien que d'autres cardinaux l'eussent possédée, il crut que sa pourpre y flatterait le roi, contribuerait à la lui faire donner, et ferait encore plus sa cour; il ne se trompa pas, surtout avec le concours des jésuites; mais sa nouvelle dignité fit un embarras.
Cette charge, qui n'est pas des premières, ni même des secondes, ne prête serment qu'entre les mains du grand maître de la maison du roi, et ce grand maître était un prince du sang. Comment donc oser lui souffler un droit acquis, mais comment aussi ployer la pourpre romaine à cette sorte d'humiliation? Le respect du roi, légué par le Mazarin, pour cette sacrée pourpre l'emporta cette fois sur celui dont il se montrait si jaloux pour les princes de son sang. M. le Duc était son petit-fils, et dans la première jeunesse. Il donna la chapelle à Polignac, et régla que, pour cette fois et sans conséquence, sous prétexte d'être pressé d'entrer en fonctions, il profiterait du voyage que M. le Duc allait faire pour la première fois en Bourgogne et y tenir les états, pour de son consentement prêter, en son absence, serment entre les mains du roi, et cela se fit tout de suite avec la charge de grand aumônier.
En même temps, le cardinal de Polignac reçut le bonnet des mains du roi, présenté par l'abbé Howard, camérier du pape. C'était raison qu'un camérier anglais apportât une barrette de la nomination du roi d'Angleterre, mais ce ne l'était pas que le nommé fût le négociateur à Utrecht de tout ce qui fut convenu contre le prince à qui il devait sa fortune. Malgré l'orgueil de la pourpre, la vanité du bien-dire perça. Le cardinal de Polignac ne dédaigna pas de paraître devant le roi à la tête de l'Académie française, à la suite de tous les corps qui le haranguèrent sur la paix. Ses grâces, ses charmes et son bien-dire, si odoriférant et si flatteur, céda toutefois à la justesse et à l'éloquence mâle et naturelle du recteur de l'Université, qui enleva tous les suffrages avec tant de violence, qu'il fut interrompu par les applaudissements, et que le roi lui fit une réponse pleine de l'admiration de son discours. Vittement, c'était son nom, ne s'en éleva pas davantage, n'en demeura pas moins renfermé dans la poussière des colléges, et ne cultiva personne; mais, ce qui ne s'est peut-être jamais vu, et dans une cour comme elle était alors, sa harangue ne sortit point de la mémoire du roi. Elle y surnagea, chose encore plus extraordinaire, à tout ce qui le pouvait rendre suspect sur la doctrine, et des mœurs trop pures et trop austères pour le goût d'alors; cette harangue seule et qu'on crut oubliée avec tant et [tant] d'autres, prévalut à tout, et le fit deux ans après sous-précepteur du roi d'aujourd'hui, par le souvenir toujours présent qu'en avait conservé Louis XIV. On verra en son temps que ce fut le seul bon choix qu'il fit pour l'éducation de ce jeune prince, qui eut aussi le sort ordinaire de ce qu'il y a de meilleur dans les cours.